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La Question phénoménologique est celle des rapports de la conscience et du monde. Elle ne saurait cependant appeler trop hâtivement un quelconque principe de réponse, ni même constituer une tentative de produire un quelconque répondème qui puisse combler cette Question – elle est de facto une tâche qu’il faut toujours ré-entreprendre ; rien ne nous attends derrière les questions, elles « n’appellent pas l’exhibition de quelque chose dite qui y mettrait fin »[1]. La phénoménologie n’est que le développement de cette Question, son maintient jusqu’à sa déprise dans les obscurités dont elle s’enveloppe lorsqu’elle atteint enfin les premières esquisses du monde et de la conscience dans leur lieu commun originaire. C’est en ce lieu qu’échoue la Question phénoménologique et ses questionnements inhérents, c’est de ce lieu qu’elle se trouve être ce pour quoi elle est survenue – car il n’est pas question de répondre seulement aux questions (que suis-je ?, qui suis-je ? pourquoi suis-je ?), mais de répondre de la provenance de ces questions. D’où l’attention à la forme du questionnement, car « la manière de questionner prescrit un certain type de réponse, et la fixer dès maintenant serait décider de notre solution »[2]. Ainsi la philosophie ne procède pas d’une pensée qui se développe de manière simplement positive, savoir chercher des réponses, par exemple, ni de manière négative, comme le ferait une dialectique phénoménologique ou existentialiste. La Question développe avec elle son type de questionnement, elle se cherche elle-même dans l’origine des questions qu’elle produit. Aussi,
« « Que sais-je ? », c’est non seulement « qu’est-ce que savoir ? », et non seulement « qui suis-je ? » mais finalement « qu’y a-t-il ? », et même : « qu’est-ce que le il y a » »[3].
Toutes les questions dites « régionales » sont renvoyées au Même d’un originaire arrière-fond ou arrière-plan, à l’Être-souche, l’Être Stamm und Klotz, en pré-repos. L’exploration de ce lieu originaire, où non pas les choses sont posés affirmativement, mais là où les choses sont, là où il y a les choses, requiert de s’interroger sur ce que c’est pour les choses et pour nous d’être « dans » ce il y a. S’y tenir, c’est ce que nous faisons naturellement, tous les jours, dès le réveil, c’est au cœur de l’il y a que nous sommes. C’est une certaine foi perceptive qui nous assure une subsistance au sein de l’il y a, parce qu’elle nous permet de vivre dans une certaine naïveté, dans une certaine familiarité avec les choses, dans une attitude naturelle tranquille parce qu’ignorante des soucis du phénoménologue, qui voit et qui manipule sans s’interroger sur le voir ou sur l’être de l’outil manipulé. Mais dans un autre sens, la foi perceptive est Urglaube, contact sauvage avec le monde, rapport permanent avec l’étrangeté et avec l’opacité des choses qui ne correspondent jamais exactement à ce que l’on dit d’elles ou à ce qu’on veut leur faire dire dans l’expérimentation scientifique, et qui se refusent à se laisser cerner par l’eidos, à se laisser approcher dans ce qu’elles sont en elles-mêmes, qui sont dans une perpétuelle fuite vers l’invisible[4], vers l’opaque, et non pas vers le non-sens, mais vers une sorte d’archi-sens d’où émergent tous les sens.
Entre ces deux variations de la doxa originaire, il y a le problème du monde : d’un monde à la fois familier, ininterrogé ou difficilement interrogeable parce qu’il faut se déprendre de cette familiarité, et d’autre part d’un monde étrange et obscur, qui appelle à être exprimé, qui cherche son expression en nous. C’est pourquoi « le monde est ce que nous voyons », mais qu’« il faut pourtant apprendre à le voir »[5].
Pour éduquer notre regard, Merleau-Ponty cherche à activer un authentique rapport avec le monde – le véritable Ur-Typus des Relativen des husserliens. Cet « authentique rapport » se présente comme rapport premier : « premier » parce que précédant toutes les sédimentations que nous lui fait subir la conscience constituante ; « premier » parce qu’irréfléchi, mais aussi parce que résistant à la dialectique, à la science, à l’eidétique, à la coïncidence : « premier » parce qu’originaire, c’est-à-dire précédant tout le reste. Aussi, une philosophie du rapport premier, c’est une philosophie première.
L’originalité irréductible de Merleau-Ponty consiste en ce qu’il a compris cette philosophie première du rapport premier comme une exploration. L’exploration de cet arrière fond mouvant et équivoque revient donc à la phénoménologie comme philosophie première telle que Merleau-Ponty la comprend : une phénoménologie exploratrice pour des phénoménologues explorateurs capables d’avancer à tâtons dans des milieux inconnus, et non pour des phénoménologues conquérants, qui cherchent à « élaborer ça et là ne serait-ce qu’un minuscule terrain ferme dans le marais de l’obscurité invincible, sur lequel on puisse tenir vraiment debout, dans l’évidence précisément de cette situation droite »[6]. Dégager un lieu inflexible ou gagner la flexibilité ontologique première, voilà l’alternative. La différence d’approche n’est pas seulement inflexion ou rupture, ni même antithétique, mais elle est métaphysique. En d’autres termes, la différence ne ressort pas d’une épistémè, mais d’un impensé radical. L’impensé est toujours premier dans toute recherche, et c’est ce premier qui est l’origine de la recherche Merleau-Pontienne. Il le dit lui-même : « une pensée n’est pas des idées, c’est circonscription d’un impensé »[7]. Or tous les impensés ont à voir avec une certaine conception de l’il y a ; toute Weltanschauungsphilosophie se définit par sa position vis-à-vis de ce qui est. L’impensé, disait Heidegger – c’est son concept -, a à voir avec la manière dont l’Es gibt se donne et se voile dans une philosophie. Si Merleau-Ponty conteste toute possibilité de fondation ultime de la philosophie sur un point fixe et univoque, sur une origine, c’est parce que sa conception de l’il y a premier est justement mouvante et équivoque : « L’originaire éclate, et la philosophie doit accompagner cet éclatement, cette non-coïncidence, cette différenciation. »[8]. Éclatement et non-coïncidence qui empêche bien évidemment le penseur de chercher une ἀρχή originelle. Merleau-Ponty cherche non l’origine, mais l’originaire. Par là il recouvre la possibilité d’une origine fixe. Sa philosophie est exploration parce qu’elle ne se sent plus à l’aise dans les cadres philosophiques classiques : elle cherche d’autres chemins, d’autres horizons, elle s’exile du philosopher classique. Pour ce faire, elle remet en doute l’impensé même du philosopher classique, savoir sa recherche d’évidence et de stabilité, et s’engage – tout comme Bergson – dans la recherche de l’inévidence et du mouvant.
C’est alors indubitable : la philosophie première de Merleau-Ponty, c’est celle du premier explorateur (bien qu’il n’y ai que des premiers dans ce domaine), c’est-à-dire de celui qui s’exile vers une nouveauté radicale, peut-être vers les origines de sa civilisation, mais surtout vers un inconnu et un invisible. C’est alors une exploration sans cartographie préétablie, exactement dans la situation des découvreurs de nouveaux continents. La cartographie, il faut le comprendre, ressemble beaucoup trop au « squelette » eidético-ontologique des husserliens durs[9], qui prétendent ou plutôt postulent que le λόγος est une structure formelle vide, ou que Dieu est mathématicien, comme Galilée, car cela est la même chose. Le premier explorateur, c’est celui qui abandonne sa place de point zéro de l’univers, qui se refuse à être kosmotheoros et à surplomber l’être. C’est celui qui se (ré-)engage dans le temps et dans l’espace, dans une exploration à tâtons, une progression dans l’invisible, guidé par sa seule vision. Le mouvement de pensée de ce qu’il nous reste du Visible et l’invisible montre bien cette exploration d’un domaine sauvage encore inexploré : il cherche à déboussoler et à se déboussoler, en écartant les différentes erreurs (les philosophies de la réflexion, la Gestaltpsychologie, les dialectiques hégéliennes et sartriennes, la phénoménologie eidétique de Husserl, l’intuitionnisme bergsonien) comme autant de branches qui obstruent son chemin, un chemin dont personne ne sait où il mène. Il est bien vrai que « Husserl est un peu comme Moïse qui a vu la terre promise sans en fouler le sol et sans doute sera-ce le cas de tout membre du “peuple phénoménologique” »[10] ; si par un mystérieux μοιρολατρία, les phénoménologues doivent abandonner leurs rêves et rester au seuil de ce royaume des « Mères de la Connaissance » que nul n’a encore foulé[11], c’est qu’ils n’ont pas eut le courage d’abandonner totalement leurs prétentions d’être des kosmotheoros. Le premier qui a eut ce courage, c’est Merleau-Ponty, non pas dans l’optique « d’un vœu de pauvreté en matière de connaissance » (les conférences de Paris des Méditations cartésiennes de Husserl), mais dans la manière même d’engager en explorateur dans l’origine connaître et de se refuser à être un « connaissant » pur et simple ; en d’autres termes : d’accepter le fait de se lier et d’être soi-même partie prenante du connu et de l’inconnu, d’accepter de se perdre dans le monde comme les explorateurs de forêts vierges qui en viennent à se demander, après des journées d’errance : « où suis-je ? », « quelle heure est-il ? ».
Le phénoménologue merleau-pontien (même si l’expression manque de préséance) est donc un explorateur sans cartes et qui se place à égal niveau de ce qu’il découvre, sans la posture supérieure que prennent les découvreurs de nouvelles peuplades. Par là, la philosophie de Merleau-Ponty est une manière d’atteindre l’en-commun originaire de toutes les cultures et de toutes les civilisations, ce « lieu » en-deçà de toutes cultures, et donc « avant » les sédimentations de la culture. En premier, ce que restituent la diversité des mythes, se figure être une inconnaissance partagée et mutuelle. Si « notre première vérité – celle qui ne préjuge rien et qui ne peut être contestée -, sera qu’il y a présence, que quelque chose est là. »[12], il est évident qu’elle est partagée partout et par tous : pour tous : il y a, monde, être, corps, quelles que soient les conceptions que l’on s’en fait.
Nous avons évoqué l’idée de « lieu originaire » et de « royaume commun » ; aussi, sans faire de cartographie, peut-on au moins faire une géographie de l’être ? Le problème du monde, consiste justement en ce que sa géographie n’est pas autonome – γεωγραφία est « écriture (γραφειν) du monde (η γη) » ; or l’écriture et le fait même d’écrire, sont historiques. La Terre s’écrit dans l’histoire, par l’histoire. La géographie ne va pas dans l’histoire, et réciproquement : les explorateurs changent l’histoire, et l’histoire produit ses explorateurs. Leur lien intime est dans l’auto-fondation de l’Ur-historie et de l’Ur-Arche. Dans une note de travail du 1er Juin 1960, qui montre l’évidente lecture du texte sur l’Arche-originaire de la Terre qui ne se meut pas de Husserl[13], Merleau-Ponty écrit qu’
«il ne faut pas opposer à la philosophie de l’histoire [de Sartre], une philosophie de la géographie (…) mais une philosophie de la structure qui, à la vérité, se formera mieux au contact de la géographie qu’au contact de l’histoire. (…) la géographie, – ou plutôt ; la Terre comme Ur-Arche met en évidence l’Urhistorie charnelle. En fait, il s’agit de saisir le nexus, – ni « historique « géographique », – de l’histoire et de la géologie transcendantale, ce même temps qui est espace, ce même espace qui est temps (…) ce qui fait qu’il y a une inscription quasi géographique de l’histoire. »[14].
« Histoire », « géographie », se trouvent être mis en dépendance d’une « géologie transcendantale ». L’expression dévoile tout du projet de Merleau-Ponty : le « Problème fondamental : la sédimentation et la réactivation » (idem). La « sédimentation » ou la « cristallisation » de l’originaire dans un sens, c’est la source de toute science, de toute civilisation, de toute culture et de toute philosophie. La philosophie première est une archi-géologie phénoménologique : un discours phénoménologique sur l’archi-terre.
Enfin, parce que l’outil premier du géologue, c’est la perception – le géologue ne reste pas dans son bureau, il regarde les sédimentations de la terre, il touche les cailloux pour saisir leur rugosité, etc. -cette philosophie première est une exploration perceptive. C’est sur la perception que se fonde l’exploration, c’est elle seule qui nous guide : non pas des cartes, boussoles ou autres gps. De l’exploration de « la perception du monde comme ce qui fonde pour toujours notre idée de la vérité »[15] de la Phénoménologie de la perception à la fameuse première phrase du Visible et Invisible : « le monde est cela que nous percevons », il y a évidemment une constante, un fil directeur qui est celui de la perception ; mais ce n’est pas en vertu d’une nécessité d’essence, comme dans la Krisis, que Merleau-Ponty suit le fil de la perception, mais en vertu d’une volonté nette de proposer une esthésiologie de l’être. Aussi, « il faut traduire en logique perceptive ce que la science et la psychologie positive traitent comme fragments absque praemissis de l’En Soi. »[16]. L’En soi est rappelé non plus au pour soi, mais en-deçà de cette distinction, dans leur vinculum, dans ce qu’ouvre la perception du monde. Aussi le monde s’ouvre à partir de la primauté de la vision ou du contact :
« Avec la première vision, le premier contact, le premier plaisir, il y a initiation, c’est-à-dire non pas position d’un contenu, mais ouverture d’une dimension qui ne pourra plus être refermée »[17]
La perception ouvre le monde et c’est dans ce qui est ainsi ouvert que s’engouffre alors l’explorateur du monde invisible qui sous-tend le visible, sans qu’il soit question d’en sortir (!)[18]. Aussi le « monde invisible » que l’explorateur merleau-pontien cherche « n’est pas au-dessus du monde sensible, il est au-dessous, ou dans sa profondeur, son épaisseur »[19], dans son « entrelacs », dans son « chiasme », dans sa « chair » même. Le corps voit, touche, sent, goute, le monde et se laisse voir, toucher, sentir, gouter par le monde (voir les nombreuses analyses des phénoménologues sur le corps touchant-touché, depuis les Ideen II jusqu’à J-L Marion). Plus qu’exploration de l’être du milieu de l’être, la perception est l’être, elle partage son anonymat, son silence ; elle ne sort pour ainsi dire jamais de l’il y a, même par le processus des idéalisations : « il n’y a pas de monde intelligible, il y a monde sensible »[20]. L’intelligible et l’invisible sont donc rappelés au monde sensible que nous percevons déjà-toujours ; l’ « enfer » est évité[21], mais le « pays » qu’explore Merleau-Ponty, celui du « λόγος du monde perçu »[22], est sauvage, brut (dans le sens de brutal) parce qu’il ne laisse guère de points d’appuis où se reposer – ne sommes nous pas dans l’être en pré-repos. Aussi, s’il faut abandonner le repos du Ciel des Idées pour pénétrer dans le monde sauvage de la chair ontologique perçue/percevante, l’affaire est extrêmement couteuse. Il faut toute l’audace de l’explorateur, sans toutefois la prétention du conquérant, pour bâtir un tel projet. Il faut toute l’audace de celui qui est premier dans l’ordre de la pensée.
Vivien Hoch
[1] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, Gallimard, tel, 2007, p. 208
[2] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 208
[3] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 169
[4] « Perpétuelle fuite vers l’invisible » alors qu’il est possible de discuter du fait que c’est peut-être le visible en tant que tel
[5] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 18
[6] Edmund Husserl, Lettre à Dorion Cairns du 21 mars 1930, Fribourg
[7] Maurice Merleau-Ponty, Notes de cours sur l’origine de la géométrie, puf, Épiméthée, 1998, p.14
[8] Maurice Merleau-Ponty, Visible et Invisible, p. 163
[9] C’est évidemment (un certain) Husserl qui se propose de bâtir une telle cartographie des rapports de la conscience et du monde, notamment lorsqu’il tente de fonder une eidétique des actes psychiques purs.
[10] Marc Richir, Autant de chantiers ouverts pour l’analyse phénoménologiques (Entretiens), in Le magazine littéraire n°403, Paris, 2001, p. 61
[11] Edmund Husserl, Krisis, § 42 : « Combien nous avons besoin de ne plus nous mouvoir sur le vieux terrain familier du monde, et de nous tenir au contraire grâce à notre réduction transcendantale ne serait-ce qu’à la porte d’entrée de ce royaume des « Mères de la Connaissance » (« Miitter der Erkenntnis ») que nul n’a encore foulé ? »
[12] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 210 – Ce texte est celui d’un fragment intitulé « l’être préobjectif : le monde solipsiste » qui n’eut surement pas été conservé dans la version définitive du Visible et l’invisible (Claude Lefort le place en annexe). Nous noterons que Merleau-Ponty poursuit cette tentative de commencement (un commencement écarté par le philosophe) en annonçant ses priorités : « Avant d’en venir au « quelqu’un », demandons-nous ce que c’est que le « quelque chose » » (ibid.). Par là est écarté toute tentative de commencer par l’altérité comme fondement discursif, ou de bâtir la recherche sur ce déjà-là lourd de sens qu’est autrui. À ce niveau de perplexité devant la présence des choses (l’il y a), autrui est une chose comme une autre.
[13] Voir Edmund Husserl, La Terre ne se meut pas, trad. fr. D. Franck, éd. Minuit, 1989, Paris
[14] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 307, note de travail du 1er juin 1960
[15] Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, avant-propos, XI
[16] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 304, note de travail de Mai 1960
[17] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 196
[18] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 197 : « Or, une fois entré dans cet étrange domaine, on ne voit pas comment il pourrait être question d’en sortir »…
[19] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 273
[20] Maurice Merleau-Ponty, Le visible et Invisible, p. 267
[21] En référence aux séminaires du Thor de Heidegger : voir le protocole de la séance du 8 septembre 1968, dans Questions IV, Gallimard, p. 409-410 : « Qu’est-ce qui est essentiel à la perception ? Quelqu’un dit l’aisthesis, et s’attire cette réponse que « avec les grecs l’enfer a déjà commencé précisément avec la distinction d’aisthesis et de noesis » ».
[22] Maurice Merleau-Ponty, exposé de candidature au Collège de France, dans la Revue de métaphysique et de morale, n°4 (1962), p.408